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du Morvan et d'Artense

blog de généalogie

Une Morvandelle à Paris

Le 23 juin 1868 à 11 heures du matin, se présentent à la mairie de Villapourçon (Nièvre) Lazare Plantard et Pierrette Martin.

Lazare a 23 ans et est domestique au Creux. Il est accompagné de son père, Jean.  Sa mère Charlette Courault est décédée en 1861, à l’âge de 41 ans, après avoir mis au monde 8 enfants.

Pierrette a 22 ans, elle est accompagnée de ses parents, Jean et Françoise Martin, propriétaires au Foudon.

Ni les mariés, ni leurs parents, ni les témoins, à l’exception de l’instituteur du village ne savent signer l’acte de mariage.

Ce mariage en plein mois de juin, période peu habituelle à cette époque pour les paysans, s’explique ici très bien. En effet, dès le mois suivant, le 31 juillet, Pierrette va mettre au monde sa première fille, Annette.

Lazare et  Pierrette sont alors tous les 2, journaliers au Foudon et Jean Martin le grand-père devient le parrain d’Annette.

AD 58   5Mi13 607 p 541

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En 1872, lors de la naissance de leur deuxième enfant, Jean Marie, ils sont toujours journaliers mais à l’Haut de l’Arche. Ils se sont éloignés de la famille de Pierrette.

Une Morvandelle à Paris

En 1874, nait Jeanne leur troisième enfant. C’est après cette naissance que la vie de la famille va changer. En effet, comme bon nombre de Morvandelles, Pierrette décide de monter à Paris pour devenir « nourrice sur lieu ».

En effet, en cette fin de XIXème siècle, toutes les familles un peu aisées, souhaitent accueillir sous leur toit une nourrice pour allaiter leur nouveau-né. Des recruteurs parcourent les campagnes pour démarcher les femmes enceintes et leur vanter les avantages de la profession. A Paris, des bureaux de placement, permettent aux futurs employeurs de rencontrer celles qui nourriront les nouveau-nés. Une loi est même votée en 1874, afin de règlementer cette « industrie des nourrices ». Dès lors, chacune aura un carnet mentionnant son état civil, sa description, son statut marital, l’âge et le lieu de garde de son enfant. A son arrivée au bureau de placement, chacune passera une visite médicale préalable à toute embauche. 

Les nourrices montent à Paris avec leur bébé, qui est redescendu par une intermédiaire, dans leur famille dès qu’elles ont trouvé un employeur. D’un seul coup, ces femmes passent de la masure où elles vivaient à une maison bourgeoise parisienne. Elles reçoivent un trousseau complet, et sont mieux traitées que les autres domestiques, notamment au niveau de l’alimentation, puisqu’elles allaitent. Elles suivent la famille dans leur lieu de villégiature, promènent les enfants dans les parcs.

Une Morvandelle à Paris
Une Morvandelle à Paris

 Elles allaitent pendant un peu plus d’un an, mais peuvent rester plus longtemps  dans la famille comme « nourrice sèche ». A leur retour dans le Morvan, l’argent gagné leur permet de réparer ou d’acheter une maison appelée « maison de lait ». Les nourrices gardent aussi souvent contact avec leur famille parisienne, permettant ainsi à d’autres membres de la famille de trouver un travail.

Pour Pierrette, cette montée à Paris va avoir une conséquence moins heureuse car sa fille Jeanne décède à l’âge de 3 mois. Sur son acte de décès, il est bien spécifié que sa mère est nourrice à Paris.

AD 58   2 Mi EC 562 p 66

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Lazare et  Pierrette vont encore avoir d’autres enfants : Marie en 1876, Lazare en 1879, Pierre en 1884.

 Pierrette va-t-elle remonter à Paris ? Peut-être pas, mais elle va devenir « nourrice sur place », c’est-à-dire qu’elle va accueillir chez elle un « Petit Paris ».

Une nourrice sur place gagne moitié moins qu’une nourrice sur lieu, mais elle peut continuer à allaiter son propre enfant. Le Morvan, proche de Paris, mais dont les habitants sont pauvres, accueille de nombreux « Petits Paris », enfants nés à Paris et abandonnés ou confiés par leur mère aux services sociaux.  Cet accueil donne un complément de revenus recherché par les familles morvandelles.

Au recensement de 1876, la famille accueille une petite fille.

AD 58   6 M 309/1 p60

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En 1879, la famille a quitté Villapourçon pour Larochemillay au lieu-dit les couturiers, peut-être dans une maison plus agréable grâce à l’argent gagné par Pierrette?

En 1883, Lazare et  Pierrette perdent leur fils aîné Jean Marie qui a 11 ans.

En 1886, Pierrette est enceinte. Elle accouche le 28 mars 1887 d’un petit garçon mort-né. Elle a 40 ans et elle décède quelques jours plus tard le 5 avril 1887.

AD 58  2 Mi EC 252 p 183

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Son mari Lazare reste seul avec 4 enfants :

  • Annette, aussi appelée Francine, 18 ans, qui est déjà placée comme domestique ;
  • Marie 11 ans ;
  • Lazare 8 ans ;
  • Pierre 3 ans.

 

A suivre : Une Morvandelle à New York …..

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C
Joli récit qui aborde la difficulté de quitter son enfant pour en nourrir un autre.
Répondre
J
C’est vrai, et en même temps ces femmes avaient elles vraiment le choix. La pression sociale devait être forte vu les possibilités de gains que ces postes de nourrrice permettaient.
D
Bonjour,<br /> Très intéressant comme article.<br /> Merci et bien cordialement.
Répondre
J
Merci beaucoup